Principes et enjeux

On peut définir l’assainissement écologique comme une approche d’ensemble de l’écosystème qui traite les urines et les selles humaines comme des ressources de valeur à recycler.

On l’a vu, l’assainissement écologique, parfois appelé « assainissement durable » hérite de différents courants parfois opposés. Il est donc assez difficile de donner une définition qui puisse satisfaire les différentes approches qui nous semblent pourtant toutes aller vers une approche écologique de l’assainissement. Nous préférons présenter ici plusieurs visions et tenter d’en faire une synthèse.

Selon Susana (Alliance pour un Assainissement Soutenable), "le principal objectif d’un système d’assainissement est de protéger et de promouvoir la santé humaine en favorisant les conditions pour créer un environnement sain et pour interrompre le cycle des maladies. Pour qu’un système d’assainissement soit durable, il doit être non seulement économiquement viable, socialement acceptable, techniquement et institutionnellement approprié, mais il doit aussi protéger l’environnement et les ressources naturelles" [1].

Le Réseau Assainissement Écologique qui fédère depuis 2006 divers acteurs d’opinions sensiblement différentes partage une position qui vise à « considérer les « déchets » comme des ressources ». Pour le RAE, si "l’assainissement est un processus permettant de vivre dans un environnement sain, l’assainissement écologique va plus loin, s’inscrivant dans une logique de recyclage de la biomasse et des éléments nutritifs ainsi que du respect du cycle des matières."

Cette position est partagée par les chercheurs d’EcoSanRes qui écrivaient en 1998 dans l’ouvrage intitulé Assainissement Écologique [2] : L’assainissement écologique est basé sur une approche d’ensemble de l’écosystème et qui traite les urines et les selles humaines comme des ressources de valeur à recycler.

Joseph Jenkins résume sa vision des choses dans une approche cyclique des matières organiques et du rôle de l’homme dans ces cycles :

Le cycle des nutriments humains marche ainsi : nous faisons pousser des aliments, nous les mangeons, nous recueillons les résidus organiques (fèces, urine, épluchures, résidus agricoles) et nous restituons ces matériaux organiques au sol, l’enrichissant ainsi et permettant de faire pousser d’autres aliments. Ce cycle peut être répété indéfiniment. C’est un processus qui imite les cycles de la nature et améliore notre capacité à survivre sur cette planète. [3] - Chapter Two : Waste Not Want Not (traduction L.Delort) [4]

Joseph Orszagh se situe lui-aussi dans une approche holistique encore plus large et énonce 6 principes pour sa vision de l’assainissement écologique qu’il a baptisé SAINECO [5] :

  1. Les eaux-grises (savonneuses) et les eaux-vannes (fécales) doivent être collectées d’une manière sélective et subir un traitement spécifique, adapté à leur composition de manière à ce que eaux-vannes et eaux-grises restent des ressources à valoriser. Elles ne sont des déchets que dès lors qu’on les mélange.
  2. Les eaux-vannes ou les eaux contenant des déjections humaines ou animales (riches en azote et en phosphore), ne doivent en aucun cas subir un processus d’épuration, ni être rejetées dans une eau de surface naturelle, ni épandues, ni infiltrées dans le sol. Elles doivent être traitées avec la biomasse végétale, riche en carbone cellulosique.
  3. Le but premier du traitement des eaux-vannes n’est plus de lutter à tout prix contre le péril fécal, mais de restaurer la teneur en humus et la biodiversité des sols. À ce niveau, la quantité des éléments nutritifs (NPK, etc.) ont moins d’importance que leur place dans les structures moléculaires des matières premières pour former l’humus.
  4. Les eaux-grises constituent une ressource précieuse pour l’irrigation des sols vivants et, de facto, pour l’alimentation des nappes phréatiques.
  5. Éviter par tous les moyens possible, le rejet des eaux usées (même après épuration) dans une eau de surface naturelle. Pour le traitement des eaux-grises, reconnaître le sol, l’aération et la lumière naturelle, comme des réacteurs biologiques éliminant la charge polluante.
  6. Adapter la qualité de l’eau aux usages. Assurer un statut légal identique à chaque ressource en eau, y compris l’eau de pluie. Admettre le principe, selon lequel hormis celle destinée à la boisson et à la préparation des aliments, ses autres usages domestiques ne demandent qu’une eau de qualité inoffensive, donc non potable.

De notre côté, au sein de l’association Terr’Eau, nous n’utilisons pas le terme « d’assainissement durable » qui renvoie trop au concept galvaudé et anthropocentrique de « développement durable ». Nous lui préférons le terme « d’assainissement écologique » car il suggère mieux une approche globale replaçant l’homme dans son écosystème en rétablissant les cycles naturels des matières organiques.

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